Explosion des prix des loyers et de l’immobilier en Allemagne

info intéressante sur l'Allemagne, qui était réputée pour ne pas connaître pénurie de logements, ni discriminations dans ce domaine
Mais il est aussi intéressant de voir l'Huma dénoncer "les primes à la casse" de logements sociaux, alors que des mairies gérées par le PC participent allègrement au plan Anru, dont c'est l'exacte définition : 'si vous voulez des sous, démolissez !'
Quant au gloubiboulga sur "ghettoïsation" et "mixité sociale", là on est bien dans le ton de ces mêmes mairies, qui utilisent ces pseudo-concepts pour… démolir ; et construire du plus cher pour les classes moyennes : les pauvres, partez lon des centre-villes et des transports en commun !


L'Humanité 19 Juin, 2013
Europe Les enjeux
La capitale de la Saxe est rattrapée, comme d’autres grandes cités allemandes, par l’inflation des prix des locations. Cette dérive, qui pèse sur la demande intérieure, est devenue un thème majeur de la campagne de l’élection du Bundestag.
Dresde (Allemagne), envoyé spécial. «Il y a toujours davantage de locataires qui n’y arrivent plus. Pour certains, la moitié du salaire passe dans le loyer. » Mathias Wagner est l’un des responsables de l’association des locataires (Mieterverein) de Dresde et de sa région. La ville est l’une des plus touchées d’Allemagne par l’explosion des prix des loyers et de l’immobilier, un phénomène dont le pays semblait préservé jusqu’au tournant de ces deux à trois dernières années. Aujourd’hui, il manque au moins quatre millions de logements sociaux, a calculé l’organisation de Mathias Wagner. Le sujet est devenu ultrasensible et constitue l’un des points d’achoppement majeurs de la campagne des élections du 22 septembre pour le renouvellement du Bundestag.
Raison principale de la pénurie d’appartements aux loyers abordables à Dresde : la cité ne gère plus aucun logement social. La société publique de la commune, qui possédait quelque 40 000 logements, est passée entièrement en 2006 entre les mains du privé. « La ville ne possède donc plus de structure qui lui permette d’investir elle-même dans la construction de logements neufs », souligne Tilo Kiessling, responsable de la section de Dresde de Die Linke. Il vient, avec plusieurs autres citoyens, de lancer une action référendaire locale (Bürgerbegehren) pour que la ville se dote à nouveau d’une société publique de logements. « Plusieurs milliers de personnes ont déjà signé notre pétition », précise Tilo. Si les initiateurs de ce recours démocratique rassemblent un nombre de signatures correspondant à 5 % de la population, soit 22 000, leur proposition pourra être soumise à la délibération du conseil municipal et au cas où ce dernier refuserait son adoption, à un référendum local. La démarche soulève un intérêt qui va bien au-delà des sympathisants habituels de Die Linke. « Des citoyens proches du SPD ou même de la CDU » n’hésitent pas à leur apporter leur soutien, « voire à porter eux-mêmes la pétition référendaire pour que d’autres la signent », explique Jens Matthis, un autre animateur de l’initiative.
L’ex-patrimoine immobilier public de la ville est tombé entre les mains du fonds de pension états-unien Fortress, qui a fait le forcing pour tirer les prix vers le haut. Il a été aidé en cela par les primes à la casse généreusement attribuées par le Land de Saxe et la fédération qui ont supprimé des centaines de logements, hérités de l’ex-RDA, considérés comme trop dégradés, ce qui a naturellement aggravé la pénurie. Sachant que l’habitat détruit n’a pas été compensé par des constructions neuves, à cause des mesures d’austérité imposées aux collectivités locales en vertu du fameux « frein à dette » mis en œuvre par Berlin depuis 2009. « Et à Dresde, de toute manière, on s’est mis dans l’impossibilité d’investir après la privatisation de 2006 », insiste Tilo Kiessling, qui souligne qu’il devrait atteindre le nombre de signatures requis pour l’initiative référendaire locale d’ici à l’an prochain.
L’inflation rapide du prix des logements conduit à une ghettoïsation accentuée des populations les plus en difficulté, phénomène dont l’Allemagne, excepté Berlin, était jusqu’alors relativement épargnée. Des quartiers périphériques de Dresde, comme Gorbitz ou Prohlis, sont devenus invivables avec une absence totale de mixité sociale et un taux de criminalité très élevé. Robert Wünche, un jeune homme de vingt-neuf ans, confronté à une augmentation de son loyer de plus de 22 % sur deux ans, fait partie de ceux qui ont dû quitter leur ancien logement pour « immigrer » vers l’extérieur de la ville. Il a eu la chance, lui, de s’installer dans un environnement « pas trop dégradé », dit-il, avant d’ajouter, avec un triste sourire sur les lèvres : « Mais j’ai des tas de copains, étudiants ou salariés, qui habitent maintenant de véritables zones. »
L’économie allemande, rattrapée aujourd’hui par la crise (seulement 0,3 % de croissance, selon les dernières prévisions de la Bundesbank pour 2013), pourrait bien pâtir lourdement du contrecoup du phénomène. La flambée des prix ampute en effet un pouvoir d’achat déjà mis à mal par les politiques de déflation salariale pratiquées depuis dix ans pour doper la compétitivité des firmes allemandes. Or une hausse de la demande intérieure apparaît, de fait, comme le seul salut pour échapper à la stagnation. Elle permettrait de compenser le net recul des débouchés de l’industrie exportatrice, pénalisée par l’étranglement de ses principaux clients situés en Europe et englués dans ces plans d’austérité si recommandés par Bruxelles et… Berlin.

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